« On dirait pas…du tissu? »

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Richard Serra au Grand Palais

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Le moins que l’on puisse dire c’est que pour Promenade, Serra n’a pas misé, contrairement à la reconstruction de Clara-Clara aux Tuileries*, sur une image qui s’impose d’emblée. L’axe qu’il a choisit est évident : on ne cerne pas l’oeuvre d’un seul coup d’oeil en entrant (on la voit à peine en fait) et en s’approchant, guère plus. Il faut arpenter l’espace ou du moins parcourir quelques dizaines de mètres pour en rejoindre une des extrémités et regarder l’alignement des quatre plaques métalliques.

 

Il faut l’éprouver et alors le monument se révèle puis s’impose : on marche dans un sanctuaire et l’on s’ébahit. La démesure de la cathédrale dans laquelle est sise l’oeuvre ne fait qu’en renforcer les travers, voire dessert tout Serra, en soulignant ce que pourrait  avoir de déplaisant son travail : la béâte admiration du public. 

 

Pour peu que l’on ne soit pas en manque de sacré, il est difficile de ne pas alors s’attarder sur quelques détails gênants : le kitsch de la simili-corrosion, les employés qui s’affairent avant l’ouverture de ce qui va sûrement être un nouveau bar, l’équilibre faussement précaire des stèles, qui en fait n’avaient pas besoin de ça pour céder sous le poids du lieu  -elles arrivent bien loin du sommet de la verrière.

 

Il existe à Porto, à la fondation Serralves, une oeuvre de Serra fonctionnant sensiblement sur le même principe. Peut-être ne l’avez-vous pas vue, elle est presque cachée. Le long du mur d’enceinte, deux plaques  définissent un espace à parcourir -peut-être 15 ou 20 mètres. Elles sont l’une l’autre sensiblement différentes, car elles suivent la hauteur déclinante du mur, mais on ne peut les comparer d’un simple coup d’oeil. De par sa situation dans le lieu (il faut revenir sur ses pas pour sortir) et par la nécessité de se déplacer pour comparer, le mouvement d’aller-retour est aussi inclus dans l’oeuvre, et constitue même son épaisseur.

 

On reconnaît donc quelques un des principes qui ont présidé à l’erection de Promenade. Mais le lieu est différent et  dans le hall de gare parisien, rien ne se passe. Serra semble ne plus miser que sur le gigantisme au détriment d’un lieu qu’il semble bien en peine de mettre à profit. A Porto, son travail consistait à souligner un espace banal, à donner vie à l’envers d’un décor, loin de l’allée principale. Mais si l’oeuvre n’existe que pour elle-même, elle se pare d’un décorum des plus embarrassant.

 

Dehors, il pleut. Le toit de verre se met à chanter. mais rien ne fera vibrer les monolithes noirs.  

 

 

 

*Clara-Clara inclut maintenant une belle perspective hausmanienne. 

Written by florentdelval

juin 22, 2008 at 5:49

Publié dans expo

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